Itinéraires joailliers
09 mai 2017
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Le talisman de Charlemagne au palais du Tau
Ce pendentif-talisman du IXe siècle est en fait un reliquaire, exposé dans la salle du trésor de la résidence épiscopale de Reims, jouxtant la cathédrale où étaient couronnés les rois de France. Son histoire comporte encore de nombreuses zones d’ombre.
En or filigrané et repoussé, le talisman de Charlemagne est en forme d’ampoule de pèlerinage destiné à contenir un liquide ou de la terre provenant d’un lieu saint. Haut de sept centimètres, il est orné de pierres précieuses. Côté face, il présente un cabochon de verre laissant apparaître, par un effet de loupe, une croix faite de deux prétendus fragments de la Vraie Croix. Côté pile, un saphir très pâle.
A-t-il réellement appartenu à Charlemagne ?
La légende dit que ce reliquaire a été découvert suspendu à son cou, lors d’une exhumation en 1166. S’il date bien de l’époque carolingienne, aucun texte ne permet de certifier qu’il a appartenu à l’empereur d’Occident et roi des Francs. Aucune certitude non plus concernant les circonstances dans lesquelles il a été créé même si en 1844, un journaliste écrit qu’il fut le cadeau diplomatique du calife Haroun-al-Raschid.
De prestigieux propriétaires
En 1802, l’évêque d’Aix-la-Chapelle offre ce reliquaire à l’impératrice Joséphine qui accompagne Napoléon en pèlerinage dans cette ville où sont conservées les reliques de Charlemagne. Napoléon se considère en effet comme son successeur et veut s’inscrire dans la lignée des rois carolingiens. Joséphine va ensuite le léguer à sa fille Hortense de Beauharnais, qui le porte en pendentif sur l’un de ses portraits et qui, dans ses lettres, le désigne comme un talisman. À sa mort, elle le lègue au futur Napoléon III qui le lègue à son tour à l’impératrice Eugénie. En exil, émue par le bombardement de Reims en 1914, cette dernière en fait don à la cathédrale.
Le reliquaire est-il identique à celui du IXe siècle ?
Les modifications sont nombreuses et incertaines. On sait qu’à l’origine, il renfermait des cheveux de la Vierge Marie, et c’est probablement au tout début du XIXe qu’ils ont été remplacés par les fragments présentés comme ceux de la Vraie Croix. En 2016, une équipe composée de chercheurs, historiens et gemmologues a réalisé une étude* mettant en lumière d’autres modifications. Ainsi le verre n’est probablement pas d’origine car il est rarement associé à une pièce d’orfèvrerie. En revanche d’après l’étude, les tailles rustiques suggèrent que les pierres sont bien contemporaines du talisman. Ces nouveaux indices parmi moult autres contribuent à enrichir l’histoire passionnante de cette pièce.
* étude réalisée par G. Panczer, G. Riondet, L. Forest, M. S. Krzemnicki et F. Faure publiée dans la revue de l’Association Française de Gemmologie