Style
23 mars 2017
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Krishna Choudhary, joaillier de Jaipur
Dans son showroom installé dans un haveli du XVIIIe siècle, le joaillier Krishna Choudhary commente quelques portraits de princes indiens et revient sur leur passion pour les bijoux.
L’histoire de Royal Gems m’évoque celle de Mellerio qui, en France, vient de fêter ses 400 ans…
Je représente la dixième génération de la famille Choudhary dont les origines remontent à la fondation de Jaipur. À l’origine, nous étions banquiers comme le montre ce document de 1696 portant le timbre d’un empereur moghol. Puis nous sommes devenus joailliers. Nos créations contemporaines sont empreintes de références traditionnelles comme le serti kundan, réalisé avec des feuilles d’or pur travaillées à l’aide d’un stylet, le diamant en table (sans culasse avec une seule facette principale et quelques petites autour) ou encore les émeraudes anciennes.
Les miniatures et les photographies sont aujourd’hui des témoignages précieux sur la magnificence des parures de maharadjas ?
Elles sont d’une importance capitale pour identifier pierres et bijoux. Grâce à nos connaissances et à du bon sens, il est alors parfois possible de faire le rapprochement avec une pierre apportée par l’un de nos clients pour une commande spéciale.
Parlez-nous de cette miniature de Shah Jahan…
Ce jeune prince moghol du XVIIe siècle (commanditaire du Taj Mahal) avait une passion folle pour les bijoux et les pierres, comme son père. Sur cette miniature, il est en train d’admirer une version minéralogique du kalgi (aigrette en plumes légèrement ployante) dont les tiges sont piquées dans de l’or décoré de pierres et d’émaux polychromes. On dit que cet ornement de turban stylisé aurait été influencé par la mode européenne des épingles à chapeaux… Shah Jahan porte aussi une bague d’archer comme l’impose le protocole, lors des cérémonies. L’ultime manifestation de cette passion fut son trône d’une somptuosité inégalée, en or à décor émaillé et incrusté de diamants, émeraudes, spinelles, rubis et perles.
Le maharadja Sher Singh semble prêt à partir pour la guerre et en même temps, il est extrêmement paré…
Sur le portrait, on sait qu’il porte le rubis « Timor » aujourd’hui propriété de la reine d’Angleterre qui l’a prêté lors de l’exposition de la collection Al Thani à Londres, en 2015. Au poids exceptionnel du diamant suspendu à son cou, on suppose qu’il s’agit du « Koh-i-Noor » à l’histoire mouvementée. Les émeraudes sur ces bazuband doivent peser dans les 150 carats chacune et il en possède sans doute des centaines de ce type… Les seules auxquelles on peut les comparer aujourd’hui, sont exposées au musée de Topkapi.
Sur les photos, on voit des enfants surchargés de bijoux…
Colliers de diamants plats, rangées de perles aux émeraudes gravées… Certains étaient faits spécialement pour eux, tandis que d’autres appartiennent à des adultes. Ils paraissent alors en effet, complètement disproportionnés.
Vous possédez une très belle collection de bijoux anciens, ceintures, pierres, colliers, bazuband, etc. Trouve-t-on encore de telles merveilles en Inde ou sont-elles toutes à l’étranger, dans des musées et des collections particulières ?
C’est vrai que guerres et rivalités dynastiques ont empêché la plupart des bijoux de nous parvenir intacts. Puis la plupart a été démontée et vendue après l’indépendance de l’Inde. Mais vous savez, il y a beaucoup de collections privées en Inde… Sachez aussi que l’on n’est pas à l’abri d’une surprise : en 2011, dans le temple de Sree Padmanabhaswamy (dans le Kerala), on a découvert une chambre secrète remplie d’or, de statues, de bijoux, etc., pour près de 14 milliards d’euros.