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17 juin 2021

Bijou ancien : un engouement inédit en Chine

Les bons résultats de la vente de Sotheby’s à Hong Kong intitulée « Sui Generis. Bejewelled Treasures of Time », en avril dernier révèle le goût croissant des clients chinois pour le bijou ancien et surtout européen du XIXe siècle.

Par Marie-Laure Cassius-Duranton

 

 

Organiser une telle vente composée de châtelaines, de parures en micro-mosaïque, de boucles d’oreilles en émail, de broches tremblantes en Asie est inédit et aurait été inconcevable il y a encore quelques mois. En effet ce marché se structurait principalement autour de la jadéite, des diamants, des pierres de couleur et des bijoux de fabrication récente. Et même si certaines des plus belles collections de bijoux occidentaux anciens se trouvent en Asie, comme celle d’Albion Art à Tokyo ou celle du Liang Yi Museum à Hong-Kong, l’usage de porter des bijoux de seconde main, ayant appartenu à des propriétaires successifs, n’était jusqu’alors pas particulièrement populaire. Superstitions obligent.

 

Une mutation en marche

Selon Brenda Kang, qui fut spécialiste Bijoux chez Christie’s pendant plus de quinze ans et fondatrice en 2013 de la boutique Revival Jewels (Singapour), « la clientèle chinoise apprend très vite et elle est bien plus audacieuse que celles de Hong-Kong et de Taiwan. Traditionnellement, elle achetait pour investir et ne comprenait pas les prix des pièces anciennes sans pierres contrairement à la nouvelle génération davantage consciente de la valeur artistique et historique. » Pour Magali Teisseire, directrice du département Bijoux de Sotheby’s Paris, qui travaille en étroite collaboration avec l’équipe de Hong-Kong, « les clients chinois ont d’abord privilégié les signatures et plus particulièrement celles des joailliers occidentaux bien implantés et rassurants. »  Autrement dit, Cartier, Van Cleef & Arpels, Chaumet, etc. « Ils s’aventurent maintenant sur d’autres territoires, continue-t-elle. Ils n’achètent plus seulement un bijou, mais une histoire. »

 

Bijou ancien : une éducation fondamentale

Le succès des expositions patrimoniales des grandes maisons de joaillerie française témoigne de cet engouement du public asiatique pour l’histoire du bijou occidental. Tout comme le développement des cours comme ceux de L’École des Arts joailliers (qui a désormais un campus permanent à Hong-Kong) ou ceux de Vanessa Cron pour Christie’s qui remportent eux aussi un franc succès. Ce n’est pas un hasard si dorénavant dans les catalogues de vente, des notes additionnelles accompagnent les descriptions des bijoux même sans provenance. Quant aux réseaux sociaux, ils jouent aussi un rôle déterminant dans la diffusion du goût pour ces bijoux anciens européens en Chine. Il y a évidemment Wechat ou la nouvelle application XiaoHongShu (signifiant Little Red Book) spécialisée sur les produits étrangers mais également l’impact de compte instagram comme celui de Uni Kim (@uni.fun), spécialiste Bijoux chez Sotheby’s Hong Kong.

 

L’impact sur le marché français

Cette évolution du goût de la clientèle chinoise a des répercussions directes sur le marché français du bijou ancien. Elle raffole de ce que nous délaissons et méprisons depuis des décennies : les diadèmes (surtout transformables en collier et de facture française), les pièces inattendues comme des châtelaines du XIXe siècle (constituée d’un large crochet et de plusieurs chaînes terminées par breloques, montre, etc.), les pièces compliquées à vendre ou très pointues comme des bijoux italiens en micro-mosaïques sans valeur intrinsèque. Pour les acquérir, il faut être avant tout sensible à la beauté, à la rareté, au savoir-faire… Et même les bijoux de qualité moyenne dans les ventes publiques atteignent des prix astronomiques poussés par des marchands chinois qui les revendent en Chine.

 

Nul ne peut prédire comment va évoluer le goût de ces acheteurs Chinois, mais une chose est sûre : le marché est en pleine mutation.

 

Article relatif à ce sujet :

« Il est temps de changer ! », l’étude de MAD Network

 

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