Business
03 février 2021
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Cresus, pionnier de la montre pre-owned
Cresus a été le pionnier dans le rachat et la vente de montres de seconde main, il y a bientôt 30 ans. Il en vend aujourd’hui 5 000 par an. Rencontre avec son Président, Maximilien Urso.
Propos recueillis par Sandrine Merle.
Chez Cresus, quel est le profil de l’acheteur de montres d’occasion récente ?
Maximilien Urso. Il y en a trois : le collectionneur avec une recherche très particulière, le primo accédant (pour reprendre un terme de l’immobilier) avec un budget réduit et un collectionneur-investisseur. Ce dernier, apparu au début des années 2010, est très friand des Rolex, des Patek Philippe ou encore des Cartier. Et il n’a qu’une question en tête : dans 5 ans, est-ce que je pourrai revendre ma montre en gagnant de l’argent ? À ce dernier, je me garde bien de garantir quoi que ce soit, je lui conseille plutôt de se faire plaisir !
Cresus vend en général les montres d’occasion de 30 à 50% moins chères que les neuves. Quelles sont les pièces les plus spéculatives ?
M.U. Celles pour qui l’offre neuve ne couvre pas la demande. Par exemple la Rolex Daytona achetée 12 000 euros en boutique peut être revendue, quelques heures plus tard, 23-25 000 euros. Ou la Nautilus 57-11 qui coûte 28 000 euros en boutique et 60-70 000 euros d’occasion. Depuis que Patek Philippe a annoncé l’arrêt de sa production, elle est passée à 100-130 000 euros ! La cote des Richard Mille et F.P. Journe ne cesse, elle aussi, d’augmenter.
Vous proposez aussi des bijoux pre-owned dont le marché est bien moins développé.
M.U. Cela représente aujourd’hui 15% de notre business. La joaillerie est très différente de l’horlogerie, le poids du métal et les pierres ont d’abord une valeur résiduelle. Les propriétaires ont donc plus tendance à fondre l’or et à vendre les pierres. Ensuite 70-80% des pièces sont no name c’est-à-dire non griffées. C’est en train de changer mais il faudra encore du temps pour que ce marché rattrape celui de l’horlogerie.
Quel est le risque principal pour l’acheteur d’une montre d’occasion récente, les Frankenstein ?
M.U. Non car les montres Frankenstein c’est-à-dire recomposées à partir de pièces détachées se trouvent en vintage. Dans le pre-owned, le risque principal est la contrefaçon chinoise très bien manufacturée. Nous avons des horlogers avec une grande expérience, ils montent, démontent, réparent des centaines de montres depuis des années. Au poids ou à la dureté du mécanisme, ils détectent immédiatement le hic… Ils sont comme de très bons mécaniciens avec le bruit d’un moteur !
Cresus propose une garantie de 2 ans, un service unique sur ce marché.
M.U. C’est une façon de valoriser le fait qu’on révise très sérieusement nos montres d’occasion !
Vous avez un agrément Oméga, que cela signifie-t-il ?
M.U. Avoir un agrément Oméga nous permet d’être en contact direct avec la manufacture qui nous fournit les pièces détachées (trouvables nulle part ailleurs) pour réparer leur mouvement propriétaire. Pour l’obtenir, il faut passer des tests et avoir des machines spéciales souvent très onéreuses. Dans notre atelier flambant neuf, nous venons d’investir des centaines de milliers d’euros dans ce type de machines, ce qui va nous permettre d’annoncer bientôt de nouveaux agréments.
En pleine effervescence de ce marché de seconde main, quelle sont vos relations avec les marques ?
M.U. Pendant longtemps le marché de l’occasion ne les a pas intéressé. Pas assez sexy ! Dans le contexte actuel, il est devenu un véritable relais de croissance mais ce n’est pas si simple car il faut savoir acheter. Des partenariats seraient possibles avec un opérateur comme nous mais elles sont encore réticentes et se posent beaucoup de questions. À suivre donc.
Image en bannière : Maximilien Urso, Président de Cresus
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